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Le centre d’écoute de l’association l’Etoile Culturelle d’Akbou

On part du principe que chacun à sa place au sein du centre, on ne marginalise personne, on ne ferme pas la porte, que ce soit en termes de convictions religieuses, de problèmes sociaux, on accepte, on écoute et on aide tout le monde de la même manière sans jugement !

Samir Ourtirane, responsable Pédagogique du Centre de l’ECA

Ibtissem Mekira, responsable du centre d’écoute de l’ECA :

Le centre d’information et d’écoute pour jeunes de Sidi-Ali de l’association l’Etoile Culturelle d’Akbou est situé dans un quartier de plus de 10 000 habitants dans la localité d’Akbou. Notre centre est implanté au cœur de la cité populaire de Sid Ali et propose des activités d’animations socioculturelles de proximité de manière permanente depuis 2009 au bénéfice des enfants de 6 à 17 ans. Il est composé d’une équipe permanente formée aux techniques d’animation mais manque toutefois d’équipements et de matériel pédagogique. Des activités pédagogiques et d’expressions artistiques sont menées pour plus de 100 enfants (60% de filles et 40% de garçons) à raison de deux jours par semaine. Un programme est également construit en partenariat avec le corps enseignant au sein des écoles implantées dans le quartier. Akbou est une ville cosmopolite, à prédominance jeune et est très insuffisamment pourvue en structures d’accompagnement et de loisirs pour les jeunes. Ceci induit des problématiques de déscolarisation, de désocialisation, d’isolement et d’exclusion sociale. Tous ces malaises, sont présents de manière accrue dans cette cité composée en grande majorité de familles en situation de fragilité socio-économique. Cette situation nous a interpellé et nous a conduit à proposer un programme adapté à chaque tranche d’âge et aux besoins de l’enfant et de l’adolescent en adéquation avec les préoccupations des parents et de l’institution éducative. Nous avons opté pour une démarche inclusive mettant notre objectif principal au service de l’épanouissement de l’enfant en l’aidant à se situer au sein même de sa communauté et de son environnement, à s’exprimer et à connaitre ces droits. Notre volonté est de permettre aux parents d’être partie prenante de cette démarche et de les impliquer dans des projets pédagogiques. Afin d’assurer une complémentarité des rôles éducatifs vis à vis de l’enfant, nous intervenons sur trois sites : le centre avec plus 100 enfants inscrits et deux écoles primaires comprenant environ 400 enfants.

Quelle approche genre avez-vous adopté au sein de l’association « l’Etoile culturelle d’Akbou » ? L’avez-vous intégré dans vos activités et/ou projets ?

Ibtissem Mekira, responsable du centre d’écoute de l’ECA et Samir Ourtirane, responsable pédagogique du centre :

Comme vous le savez, l’association « l’Etoile Culturelle d’Akbou » est une grande organisation composée aussi d’un centre d’écoute. Ce centre se trouve dans un quartier difficile où se côtoient des habitants de différents quartiers et de différents cultes (musulmans, chrétiens), de différentes origines (arabes, kabyles…).

Au départ, on a commencé à accueillir les enfants, puis petit à petit, on s’est dit qu’il était important d’intégrer la famille et les écoles de proximité. Au fil du travail, on s’est rendu compte que, si on voulait être plus efficace, il fallait impérativement agir à d’autres niveaux. À L’école et à la maison avec l’aide des parents.

Dans le quartier où se trouve le centre d’écoute, les rôles sociaux sont prédéfinis à la base et de là découlent le statut des femmes et des hommes dans la société. Les rôles traditionnellement dévolus aux femmes sont ceux de mères et de ménagères alors que les hommes assurent le rôle de chef de famille pour répondre aux besoins financiers et matériels des membres de leurs familles.

Les femmes étaient isolées, elles avaient moins accès à l’information et disposaient de beaucoup moins de liberté et de mobilité.

Nous avons commencé par organiser des événements au sein du centre pour les femmes du quartier. Elles n’ont pas répondu à notre invitation. Puis, nous avons organisé la fête du 8 mars où quelques femmes sont venues, ce qui nous a amené à changer de stratégie. Nous voulions que ces femmes participent à des ateliers et là nous nous sommes fait aider par des amies femmes du quartier qui le connaissaient parfaitement et les femmes habitantes. Le but était de les écouter afin de mieux répondre à leurs besoins.

De là, a germé l’idée d’organiser une journée dédiée exclusivement aux femmes du quartier et animée par des femmes de l’association afin de gagner leur confiance et celles de leurs familles. Cette journée était consacrée à partager entre elles leurs savoir-faire et à créer un espace de discussion.

A partir de cette idée, nous avons eu, par la suite, d’autres propositions de la part de ces femmes, nous avons commencé à organiser des séjours, puis des formations et au fur et à mesure, ces femmes sont devenues force de proposition. A travers ce centre, elles partagent des idées, des propositions et des projets. Lors d’un atelier, elles ont même proposé de créer un réseau de femmes partageant des compétences pour créer des micro-entreprises. Nous pensons même à les accompagner dans leurs projets d’entrepreneuriat !

Une des femmes adhérentes du centre nous a même confié un jour « Grâce à vous, je me sens renaître. J’ai une valeur ! ».

Avez-vous avez rencontré des difficultés à intégrer cette approche dans l’association et pouvez-vous partager vos recommandations avec les associations qui souhaitent intégrer cet aspect dans leurs activités et/ou projets ?

Ibtissem Mekira, responsable du centre d’écoute de l’ECA :

Quand on a commencé à prendre en charge les enfants, on s’est rendu compte que l’approche était différente entre la réalité constatée sur le terrain et l’apprentissage à l’école. Ça ne suffisait pas. Nous avons donc repensé notre façon de travailler et avons commencé à travailler avec les parents.

La grande difficulté que nous avons rencontrée avait trait à la méfiance.

Quand les enfants, les parents, les femmes rentraient au centre, ils s’isolaient. Les filles et les garçons restaient dans leurs coins, séparés et ils ne se parlaient pas.

Nous avons sollicité des psychologues pour travailler ensemble sur des programmes d’animation adaptés aux difficultés auxquelles nous étions confrontés sur le terrain. Grâce à ces animations, nous avons pu rétablir la communication et travailler plus efficacement pour atteindre notre objectif.

L’animation a un pouvoir incroyable, quand elle est encadrée et ciblée, elle favorise la cohésion et encourage l’expression et l’épanouissement des individus !

Samir Ourtirane – responsable pédagogique du centre d’écoute de l’ECA :

Parmi les ingrédients nécessaires à la réussite de l’intégration du genre dans les activités de l’association il faut avant tout situer la démarche dans un travail d’équipe orienté vers un même objectif et prendre le même chemin. Être animé de la même volonté, avec une participation collective complémentaire et s’impliquer pour que naissent la confiance, le respect. On ne juge personne. Dès le début, nous avons été sensibles aux choses dont les femmes se méfiaient. On part du principe que chacun à sa place au sein du centre d’écoute, on ne marginalise personne, on ne ferme pas la porte, que ce soit en termes de convictions religieuses, de problèmes sociaux, on accepte, on écoute et on aide tout le monde de la même manière sans jugement.

Quel message pour les membres de Joussour ?

Samir Ourtirane – responsable pédagogique du centre d’écoute de l’Etoile Culturelle d’Akbou :

Mon message pour les membres du Programme Joussour est d’œuvrer pour récolter et capitaliser les expériences si riches de chacun des membres pour essayer de créer un référentiel, pour le mettre à disposition du monde associatif.

Ibtissem Mekira – responsable du centre d’écoute de l’Etoile Culturelle d’Akbou :

Je tiens à vous remercier pour cette initiative car vous nous avez permis, à travers cette interview, de nous exprimer et de parler du travail que nous effectuons au quotidien dans le centre.

Et surtout, mon message aux membres c’est que j’ai de la chance de travailler avec une équipe qui partage les mêmes valeurs, les mêmes objectifs. Travailler dans les quartiers marginalisés et défavorisés n’est pas une tâche facile. Le respect, l’écoute et l’absence de jugement envers ces jeunes de quartiers, envers leurs mamans et leurs parents nous a permis de gagner leur confiance et de gagner en crédibilité pour être toujours réceptifs à leurs besoins. Désormais, nous faisons partie de leurs vie quotidienne !

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