Qu’est ce qui a milité à la création de l’association « Femmes Algériennes Revendiquant leurs Droits » et à quels besoins répond-elle ? En quoi est-elle socialement utile ?
FARD a été créée le 8 mars 1995. Il est évident que sa création était le fruit d’une réflexion et la réponse à la situation que vivait le pays dans les années 90 pris entre un début d’espoirs très vite transformé en champs de violences et de sang ! Des associations actives sur les droits des femmes et sur l’égalité homme / femme existaient mais le besoin d’en créer d’autres dont FARD, dans un tel contexte historique, était devenu indispensable au plan stratégique
L’approche des fondatrices de FARD est une approche globale et intégrale du statut des femmes dans le cadre d’un projet de société moderne et égalitaire aussi bien sur le formel (lois, droits, procédures) que sur le plan réel en termes d’égalité des chances pour favoriser l’accès aux droits fondamentaux basés sur le principe de l’égalité des chances par des politiques publiques, des stratégies nationales et de véritables mécanismes. C’est à ce titre que les organisations de la société civiles, dont les associations font partie, ont un rôle à jouer au titre d’actrices de ces politiques publiques. Chaque organisation, par son objet et/ou son expertise apporte sa valeur ajoutée et est socialement utile.
C’est dans cet esprit que l’association FARD est utile socialement en matière d’expertise dans le domaine de l’intégration du genre au développement et sa contribution, avec d’autres acteurs, à des programmes de développement, des projets et des actions.
A votre avis, le mouvement associatif en général et les membres de Joussour en particulier ont-ils une attention plus marquée à l’intégration des femmes tant dans leurs activités que dans leurs équipes et gouvernance ?
Les femmes en tant d’actrices restent, malheureusement, à la marge dans le mouvement associatif exception faites des associations actives dans le domaine des droits des femmes. Dans le domaine social, plus particulièrement dans le caritatif, elles sont confinées dans des rôles encore « traditionnels » au vu de l’évolution de la société et de ses besoins. Dans les autres secteurs (éducation, tourisme, santé, culture, patrimoine, environnement, sport et loisirs, économie verte, économie solidaire, enfance, jeunesse, etc.), elles sont principalement considérées comme des cibles et/ou des bénéficiaires mais sont de plus en plus parties prenantes dans la réalisation des activités (avec souvent des rôles « traditionnels » reproduisant et prolongeant leurs rôles de reproduction dans l’espace domestique / privé).
En ce qui concerne les instances de gouvernance le mouvement associatif reste à l’image du reste des institutions et instances de décision à savoir, une faible proportion de femmes intégrées aux gouvernances puisque la proportion de femmes incluses ne dépasse pas, en moyenne, 30 %. Toutefois, on relève que dans les associations créées par des jeunes et/ou pour les jeunes, dans les différents secteurs, elles sont plus intégrées et c’est une note d’espoir. A titre d’exemple, on parle même de troisième génération dans certains secteurs tel celui des droits des femmes.
Pour le Programme Joussour, l’intérêt du genre et l’intérêt à accroître la participation des femmes n’ont pas été portés comme un intérêt stratégique ou du moins pas assez institutionnalisé. Au fur et à mesure, au regard des champs d’action du Programme et de ses membres, la question a été inscrite dans la réflexion et les questions débattues. Des initiatives, des projets et des outils se mettent en place dans cette perspective et les lignes directrices des dispositifs du programme sont appelés à introduire cette dimension.
Vous avez accueilli de jeunes porteurs de projets soutenus par Joussour dans le cadre du Fonds d’Appui aux Initiatives Jeunesse, ce dont nous vous remercions, quel regard jetez-vous sur cet échange ?
C’est une des initiatives à laquelle je faisais allusion précédemment.
La plupart des participant –e –s de plusieurs régions du pays avaient conscience de l’importance de l’intégration du genre dans leurs actions au sens de l’exploitation du potentiel humain qui est mis à la marge, qu’il s’agisse les difficultés rencontrées en tant que jeune ou de la double difficulté que rencontrent les jeunes femmes.
Cet échange, par beaucoup d’aspects, ne dérogeait pas la situation d’incompréhension du concept genre et à la confusion soit avec la notion de sexe et/ou de femme(s). Par ailleurs le manque de pédagogie et d’outils (l’appropriation de ses outils) font qu’il existe une résistance à cette approche alors qu’elle constitue une véritable valeur ajoutée dans l’intervention des acteurs de développement sur les territoires et l’espace local.
J’ai trouvé une grande écoute, une curiosité et une recherche d’éclairage mais aussi, des pratiques qui ne sont pas forcément conscientisées. Dans le sens où la volonté exprimée par le vécu, au quotidien et un désir de changement des rapports entre les hommes et les femmes vers au minimum plus d’équité, voire d’égalité légitimée à plus d’un niveau dans les structures, notamment en matière de gouvernance que dans leurs actions.
Quel message pour les membres de Joussour ?
L’approche genre contribue à assurer l’efficacité, l’équité et la durabilité des projets et programmes de développement. L’intégration de cette dimension à tous les niveaux (dans les activités, les équipes et la gouvernance) est plus que nécessaire. Son objectif est d’améliorer des conditions socio-économiques dans le but de permettre aux femmes et aux hommes de bénéficier et de participer au développement économique, politique et social de leurs territoires.
L’intégration de cette dimension à tous les niveaux (dans les activités, les équipes et la gouvernance) est plus que nécessaire. Son objectif vise à améliorer des conditions socio-économiques dans le but de permettre aux femmes et aux hommes de bénéficier et de participer au développement économique, politique et social de leurs territoires.