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Enquête Covid-19 : interview de Mouffok Cherifa, directrice de la ferme pédagogique « Ibtissama »

L’association Ibtissama met à disposition de la population les centres suivants :

Le centre psychopédagogique a pour mission l’accueil d’enfants et d’adolescents déficients mentaux souffrant d’une débilité légère, moyenne et profonde ou d’enfants en difficultés psychologiques âgés de 5 à 18 ans. Ils bénéficient d’une prise en charge éducative et/ou rééducative.

Le centre d’aide par le travail (CAT) accueille des adultes plus de 18 ans. Il permet aux personnes handicapées qui n’ont pas acquis suffisamment d’autonomie de travailler en milieu ordinaire, y compris en entreprise adaptée ou de façon indépendante, d’exercer une activité professionnelle dans un milieu de travail protégé dans le but de les insérer aux plans social et professionnel.

Le foyer de vie a vocation à accueillir des personnes en situation de handicaps physiques, mentaux (déficients intellectuels ou handicapés mentaux) ou atteintes de handicaps associés.

Comment avez-vous vécu à titre personnel la pandémie de la Covid-19 en Algérie ?

Le virus c’est propagé graduellement dans la population. Au moment où les autorités ont annoncé les premières mesures, en avril 2020, j’avais décidé de travailler encore pendant une semaine… mais avec l’arrêt des transports et la fermeture des écoles, je me suis mise au télétravail avec les collègues. J’avoue que, psychologiquement, être enfermée chez soi h24 pendant plus d’une semaine, c’est difficile. Le virus était sur toute les lèvres, de plus la situation dans la wilaya de Sétif s’aggravait au fur et à mesure. Les images étaient insupportables et les réseaux sociaux aggravaient la situation. Je me rappelle même, que la première question qui me venait à l’esprit pendant un appel était : « Et comment va avec le virus ? Quelqu’un de malade chez vous ? »

On a repris il y a 3 mois, en juillet 2020, et de manière alternée. La reprise des activités en ligne et par téléphone m’aide énormément à ne pas retomber dans la paranoïa des premiers temps. 

Comment votre équipe a fait face à la pandémie de Covid-19 ?

Avec la décision gouvernementale de fermer l’ensemble des établissements scolaires nous avons fermé l’ensemble de nos centres d’accueils. L’ensemble des salariés ont été mis en congés ou en télétravail. Pour ce qui concerne la ferme pédagogique, nous avons opté pour un entretien des espaces et des animaux par les agents habitant à proximité de la structure et en alternance. Nous avons également maintenu une continuité administrative via un employé qui se déplaçait régulièrement au bureau.  

Quelle crise similaire avez-vous eu à gérer dans votre région ou pays ?

Quand j’étais étudiante, en 2000, Beni Ouertilane a été touché par un tremblement de terre assez fort. Je me rappelle des terribles dégâts qui avaient frappé la ville mais aussi de la solidarité entre voisins. J’étais en classe de terminale à l’époque et la fermeture de écoles, l’avenir incertain relatif au passage du baccalauréat ainsi que la vie dans des conditions difficiles étaient mon quotidien. Ce souvenir était ancré en moi et en 2001, pendant les inondations de Bab el oued, j’ai senti monter le besoin de soutenir et de venir en aide, ne serait-ce que via le téléphone… Je me rappelle de la longue file d’attente dans la cité universitaire pour prendre des nouvelles des copines à Alger et de leurs familles…

J’évoque ces catastrophes du passé mais je ressens le sentiment que notre travail au quotidien avec notre public est une crise permanente.

En 2007 quand nous avons commencé, nous manquions de tout et nous traitions d’un sujet difficile dans une région aux traditions et mœurs conservatrices. Parfois je me pose la question de l’égalité des hommes quand je vois un handicapé mental avoir accès a si peu comparativement à son égal non handicapé. Nous faisons aussi face, parfois, à des abus sexuels, physiques et moraux commis au sein de la cellule familiale de la personne handicapée ou de son entourage. Je considère que chaque enfant n’ayant pas le droit à une dignité et une scolarité comme une crise quotidienne et je me bats pour son droit à la vie, à la dignité et à l’éveil.             

Comment jugez-vous votre réactivité face à la crise sanitaire ? En quoi cette expérience va-t-elle changer votre manière d’appréhender le futur ?

Honnêtement, je la juge moyenne. Nous avons adapté nos interventions les plus urgentes par téléphone et sur le terrain mais en parallèle, nous nous sommes rendu compte de la faiblesse de notre présence sur les réseaux sociaux et de notre capacité à délivrer nos messages via ces derniers. Nous allons donc travailler à renforcer notre présence sur les réseaux sociaux, via une stratégie de communication pour toucher un public large et varié.      

Quelles sont les activités que vous avez menées pendant la pandémie du covid-19 ?

Au début du confinement, on ne savait pas trop quoi faire. Nous étions sidérés et manquions de moyens. Il nous a fallu un temps d’adaptation et rassembler des ressources.

Dans un second temps, nos psychologues ont proposé de développer des consultation téléphoniques (entre 9h et15h30) pour avis, orientations et conseils relatifs à la vie en confinement. Ensuite avec l’évolution de la pandémie et la prolongation du confinement nous avons décidé d’assurer des consultations psychologiques en présentiel et de soutenir les déplacements nécessaires en cas de consultations médicales et de faciliter l’accès aux soins pharmaceutiques.

Nous disposons également de deux appartements que nous avons a mis à disposition des équipes médicales et également mis à leur disposition des bus avec chauffeurs pour faciliter leurs  déplacements.    

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